Laura Laufer est l'auteur du livre Jacques Tati ou le temps des loisirs, publié aux Editions de l'If.

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1- Georges Franju - 2- Albatros

Franju : invités Édith Scob, Jacques Champreux, Gérard Leblanc et Georges Franju.— Les Russes à Montreuil, Albatros : entretien avec Patrick KAMENKA.








Georges FRANJU

Voici des extraits de l’émission sur Georges Franju que j’ai réalisée en 1992 avec pour invités Edith Scob, Jacques Champreux, Gérard Leblanc .

MP3 - 37.3 Mo
1/4.Franju. 32’ 33" ©Laura LAUFER. 1992
MP3 - 26.7 Mo
2/4- 23’ 19’’- Franju 2è Partie.©Laura LAUFER. 1992
MP3 - 25.9 Mo
3/4.Franju.22’40" ©Laura LAUFER. 1992
MP3 - 1.6 Mo
À propos de la rencontre en 1934 avec A. Kamenka et de la naissance de la Cinémathèque. Extrait 1’21’’ : Georges FRANJU 2 CINÉMATHÈQUE, CINÉMA Microfilms -05/10/1986 - 48min42s © ina.fr

http://www.forumdesimages.fr/les-programmes/toutes-les-rencontres/le-grand-melies-en-salle-des-collections

Et le 15 décembre 2017 rendez-vous avec Judex ! http://www.forumdesimages.fr/les-programmes/le-forum-sengage/carte-blanche-au-carosse-dor-judex

Vous pouvez aussi y entendre Georges Franju lui- même nous parler de son film Le Sang des Bêtes. La Maison de La Villette où se trouvaient les anciens abattoirs parisiens - alors propriétaire de ce document sonore m’en avait donné copie pour l’émission. Qu’elle en soit, ici, encore remerciée.Etant donnée la taille du fichier de l’émission, j’ai du le scinder en 4 parties pour la mise en ligne.

Ci-dessous : entretien avec le petit fils d’Alexandre KAMENKA, fondateur d’ALBATROS et qui fut le premier à faire don de son patrimoine cinématographique aux futurs fondateurs de la Cinémathèque française, Henri LANGLOIS et Georges FRANJU comme en témoigne FRANJU.

Georges FRANJU parle du rôle d’A. Kamenka : citation d’une minute et 21secondes d’un entretien enregistré par Serge DANEY chez Georges FRANJU. Vous pouvez écouter l’intégralité passionnante de cet entretien Serge DANEY-Georges FRANJU sur le site de l’INA. fr : Georges FRANJU ; 2 : Cinémathèque, cinéma. Microfilms - 05/10/1986 - 48min 42s).

Toutes nos rencontres "Franju" en 205, 2016 et 2017 au Forum des Images :
http://www.forumdesimages.fr/les-programmes/toutes-les-rencontres/le-grand-melies-en-salle-des-collections
http://www.forumdesimages.fr/les-programmes/toutes-les-rencontres/les-yeux-sans-visage-de-georges-franju-en-salle-des-collections
http://www.forumdesimages.fr/les-programmes/toutes-les-rencontres/le-sang-des-betes-de-georges-franju-en-salle-des-collections
http://www.forumdesimages.fr/les-programmes/toutes-les-rencontres/le-sang-des-betes-de-georges-franju-en-salle-des-collections

- 
Lire la critique que Jean Painlevé écrivit sur Le sang des bêtes : lesdocs.com/archives/écrits/ecrit6/Sang des bêtes.htm

Lire : ALBATROS des Russes à Paris 1919-1929de François Albera, avant-propos de Dominique Païni. Éd. Mazotta /Cinémathèque française. . 182 pages, 45€

EXPOSITION EN LIGNE
LE CINÉMA RUSSE EN EXIL : L’AVENTURE DES FILMS ALBATROS

http://www.cinematheque.fr/expositions-virtuelles/albatros/-
Le Lion des Mogols de Jean Epstein.©Cinémahèque Française- collection Albatros

— Entretien avec Patrick KAMENKA, petit-fils d’Alexandre KAMENKA, fondateur d’ALBATROS.

— Laura Laufer :en 1923, quand il reprend la Société Ermolieff, Alexandre Kamenka avait-il déjà produit des films auparavant ?

- Patrick KAMENKA : Kamenka reprend la société Ermolieff en 1922, suite au départ de ce dernier pour l’Allemagne. Mon grand-père était entré en contact avec des cinéastes émigrés, arrivés en 1920 à Montreuil dans un studio appartenant à Pathé, car Ermolieff cherchait des aides financières. Le père d’Alexandre Kamenka était banquier et connaissait Ermolieff. Il a tout naturellement envoyé son fils aider la troupe russe et est devenu membre du conseil d’administration de Ermolieff Films. En 1922, il a repris la direction du studio et a créé la société Albatros dont la devise était « Debout dans la tempête ». La saga Albatros était née. Mon grand-père n’avait jamais fait de cinéma auparavant en Russie. Mais il était passionné par les arts, notamment le théâtre, et avait commencé une carrière à Saint-Pétersbourg au Théâtre impérial avant la Révolution. En devenant le dirigeant d’ALBATROS, il a allié sa passion pour l’art et ses compétences financières en qualité de fils du banquier Boris Kamenka, dirigeant d’Azov Don, la quatrième banque de la Russie tsariste.

— Alexandre Kamenka avait-il lui-même émigré de Russie ?

- P. KAMENKA : La famille a émigré au moment de la Révolution. Mon arrière grand-père a décliné l’offre des bolcheviks et de Lénine de devenir conseiller financier du jeune État.
Se trouvant au Danemark après être passé avec toute sa famille par la Finlande et la Suède, Boris Kamenka a été appelé par Georges Clémenceau en 1918, à la fin de la Première Guerre mondiale, comme conseiller technique pour examiner les questions des emprunts russes et des réparations de guerre.
Il avait déjà dû, avant la Révolution de 1917, faire une partie de ses études en France en raison du numerus clausus qui frappait d’interdit les enfants de la bourgeoisie juive pour l’entrée à l’Université.

— Albatros a adapté plusieurs classiques de la littérature russe qui ont été montrés en U.R.S.S avec succès. À l’heure où le cinéma soviétique connaissait un souffle nouveau, savez-vous si des liens artistiques avaient été conservés entre la colonie des Russes d’Albatros et l’URSS ?

- P. KAMENKA : Alexandre Kamenka qui avait compris, contrairement à ses camarades du studio Albatros, que le retour en Russie n’était pas pour demain, avait décidé effectivement de distribuer ses films en URSS. Mais c’est surtout les films de la nouvelle vague Française (René Clair, Jacques Feyder, Jean Epstein, etc.), à qui Albatros a donné sa chance dans le milieu des années 20, qui intéresse les cinéastes et intellectuels soviétiques. Ainsi le grand écrivain Ilya Ehrenbourg écrit à Albatros pour avoir des films d’Epstein et Feyder.

L’intelligence de la production des films Albatros est d’avoir aussi fait appel aux talents français (René Clair, Marcel Lherbier, Jean Epstein, Jean Renoir…). Comment votre grand-père les a-t-il connus ?

— P. KAMENKA : Plusieurs vagues de départ des cinéastes russes émigrés du studio Albatros ont précipité les décisions en faveur d’un contact avec la jeune avant-garde française. Alexandre Kamenka a reçu des demandes de ces jeunes cinéastes, car ils ne trouvaient pas de producteurs suffisamment téméraires pour produire leurs œuvres.
Albatros a toujours alterné des œuvres avant-gardistes et des productions plus commerciales. Réaliste, Alexandre Kamenka comprenait que la nécessité faisait loi et qu’en étant en France il fallait allier la technique russe d’avant-garde notamment dans le domaine de la prise de vue, des décors et des jeux d’acteurs à la culture cinématographique française.

Jean Epstein reprochera aux studios Albatros de produire des films faisant trop de concessions au commerce. Pouvez-vous, à partir de là, me présenter la conception qu’Alexandre Kamenka se faisait du cinéma : populaire ? Populaire et de qualité ?

- P.KAMENKA : La direction du studio devait certainement nécessiter de faire à la fois des films d’avant garde et des films commerciaux ou populaires pour équilibrer les comptes et payer les équipes techniques, car à Montreuil les cinéastes russes vivaient en véritable phalanstère, nombre d’entre eux ne pratiquant pas ou très peu le français.
D’ailleurs Alexandre Kamenka préférait nettement le terme de directeur artistique à celui de producteur pour désigner sa fonction dans le studio. Le départ pour Hollywood ou d’autres destinations de plusieurs réalisateurs comme Tourjansky, Volkoff et surtout Ivan Mosjoukine, la star d’Albatros, a été une des raisons de l’appel aux Français. Le film de René Clair « Chapeau de paille d’Italie » fut par exemple un échec commercial, malgré sa qualité cinématographique. Albatros donna néanmoins sa chance à Jean Epstein pour tourner Le Lion des Mogols.

— De grands talents travaillaient pour Albatros : des acteurs comme Mosjoukine , des décorateurs (Lazare Meerson, E. Lourié…) … Les films et les équipes techniques des studios Albatros ont renouvelé formidablement le cinéma français. Quel regard Alexandre Kamenka avait-il sur la production française ?

— P. KAMENKA : À l’époque, le cinéma français était un cinéma commercial sans grand talent. Plutôt des séries, ou des comédies très basiques. L’arrivée à Montreuil des cinéastes russes et, ensuite, avec la création d’Albatros, les techniques d’avant-garde grâce aux opérateurs, aux décorateurs comme Meerson, Lourié, aux affichistes Bilinsky, mais aussi aux acteurs principalement Mosjoukine, mais aussi Lyssenko, Koline et tant d’autres ont révolutionné le 7e art français grâce à une osmose entre les deux pays, les deux cultures.

— Quel souvenir avez-vous de votre grand-père ? Du studio ? De la manière dont on y travaillait, l’ambiance… ?

— P. KAMENKA : Mon grand-père était un homme de grande culture, qui parlait quatre langues couramment, qui connaissait la littérature russe mais aussi française, allemande, anglaise, qui appréciait les arts en général. Si c’est par hasard qu’il est devenu un homme du 7e art, il avait depuis son enfance le goût de la culture au sens large du terme. Le studio, je ne l’ai pas connu au moment de son fonctionnement, mais Alexandre Kamenka avait un profond désir de lier les cultures française et russe, d’être un pont entre le cinéma français et soviétique.
Par exemple, à la fin des années 50, il sera l’initiateur de la première coproduction cinématographique entre Paris et Moscou avec le film Normandie-Niemen réalisé par Jean Dréville qui retraçait les combats de pilotes français contre les nazis sur le sol soviétique pendant la 2e Guerre mondiale.

— Pourquoi le studio s’est-il arrêté et dans quelles conditions ?

— P. KAMENKA : Le studio a souffert des vagues de départ des Russes et celui de Mosjoukine, véritable vedette mondialement connue à l’époque, a été un coup dur pour Albatros.
L’arrivée du parlant a également été difficile, la plupart des acteurs russes parlant avec un très fort accent.
Les difficultés financières dues aux échecs de films d’avant-garde ont également eu un effet négatif, sans oublier la crise de 1929.
Néanmoins jusqu’à la 2e Guerre mondiale, le studio, qui était devenu trop exigu, a continué à fonctionner. L’un des grands moments du studio a été le film Les Bas Fonds adapté de l’œuvre de Gorki par Jean Renoir avec deux grandes stars de l’époque, Jean Gabin et Louis Jouvet.

— Que restait-il après la liquidation du studio et qu’a fait Alexandre Kamenka des films, affiches, archives… ?

- P. KAMENKA : Le fonds Albatros a été donné par Alexandre Kamenka à la Cinémathèque française. Il a été un des premiers fonds offert à Henri Langlois et Georges FRANJU qui a permis la constitution de la collection de la Cinémathèque, dont mon grand-père, avant de mourir en 1969, a été président d’honneur.

— Propos recueillis par Laura LAUFER — .